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Le prosélytisme, de l’accueil de l’étranger à « l’irruption de l’Autre »

Si le prosélytisme est perçu plutôt négativement dans nos sociétés contemporaines, il n’en a pas toujours été ainsi et il n’est pas, en tant que tel, condamné par la loi.

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Publié le 14 septembre 2022 à 06h00, modifié le 14 septembre 2022 à 06h51

Temps de Lecture 3 min.

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Des Témoins de Jéhovah exposent des brochures à Nantes (Loire-Atlantique), le 20 octobre 2017.

Histoire d’une notion. Ils sont parfois considérés comme l’incarnation du prosélytisme contemporain : les Témoins de Jéhovah ont, depuis le 1er septembre, repris leur prédication en porte-à-porte, après deux ans de suspension due à la pandémie. Mais qu’il soit pratiqué à nos portes, dans la rue ou sur Internet, par les adeptes de quelque religion que ce soit, le prosélytisme se révèle mal perçu dans nos sociétés contemporaines. L’Académie française le définit comme un « zèle que l’on met à convaincre de futurs adeptes, à gagner à sa cause de nouvelles personnes », prenant soin de préciser que son usage est « souvent péjoratif ».

« Prosélytisme woke », « prosélytisme vegan », « prosélytisme pronucléaire » : même hors du cadre religieux, le terme sert bien souvent à critiquer le prétendu acharnement idéologique d’un adversaire, d’un « autre ». « Le prosélytisme, au fond, c’est l’irruption de l’Autre », selon la formule du juriste Xavier Souvignet (revue Société, droit et religion, CNRS Editions, 2017). « Dans la langue d’aujourd’hui, le prosélytisme désigne une ardeur intempestive à propager sa foi et on l’oppose à l’esprit de dialogue », complète le théologien Edouard Cothenet (Dictionnaire des religions, PUF, 2007).

D’ailleurs, personne n’assume officiellement de faire du prosélytisme. « Comme les premiers chrétiens, nous sommes parfois accusés de prosélytisme illégal. Cependant, ces accusations sont fausses. Nous n’imposons nos croyances à personne », se défendent les « Témoins » sur leur site. Apostolat, évangélisation, missions, prédication, « invitation » (« da’wa » en arabe). Les religions préfèrent souvent employer un autre mot. « La paix se brise quand commence le prosélytisme », déclarait même le pape François en 2017.

Une origine dans la Septante

Pourtant, le mot n’a pas toujours eu la connotation négative qui est la sienne aujourd’hui. « C’est dans le climat de conflit et de polémique du XIXe siècle entre les porteurs d’idéologies laïques et les autorités religieuses en Europe qu’il a acquis une nuance dépréciative. Travaillée par plus de deux siècles de débats et de luttes pour l’autonomie de l’homme et le droit à la liberté religieuse, la conscience moderne rejette désormais toute forme de prosélytisme. Elle y voit une sorte d’agression ou de violation de la liberté des autres », analyse l’anthropologue marocain Mohamed-Sghir Janjar (revue Histoire, monde et cultures religieuses, Karthala, 2013).

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Le terme trouve son origine dans la première traduction grecque de la Bible hébraïque, la Septante, vers 270 avant notre ère. Proselytos désigne alors un étranger admis dans la communauté juive. Petit à petit, une distinction s’opère : on va différencier les « prosélytes de la porte » – les étrangers attirés par la religion et la morale juive mais refusant la circoncision, astreints à rester sur le seuil du Temple de Jérusalem – des « prosélytes de la justice » – les étrangers embrassant les obligations de la Loi. Le terme « prosélyte » va ensuite servir à désigner tout nouveau venu dans la religion juive, puis chrétienne et, ultérieurement, par extension, toute personne récemment gagnée à une cause (on trouve trace de pareil sens en langue française dès le XVe siècle).

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